Cameroun: le Congrès américain interpelle le secrétaire Marco Rubio sur la crise post électorale.
Rapport d'analyse : Lettres du Congrès américain au Secrétaire d'État Marco Rubio sur la crise post-électorale au Cameroun (novembre 2025)
Contexte général
À la suite de l'élection présidentielle du 12 octobre 2025 au Cameroun, plusieurs membres influents du Congrès américain ont adressé des lettres officielles au Secrétaire d'État Marco Rubio. Ces correspondances expriment une vive préoccupation quant à la situation politique, sécuritaire et humanitaire dans le pays, et appellent à une réponse diplomatique ferme et coordonnée de la part des États-Unis.
Le président Paul Biya, au pouvoir depuis 1982, a été déclaré vainqueur avec 53,19 % des voix, face à l'opposant Issa Tchiroma Bakary, crédité de 39,16 %. Ce résultat, contesté par l'opposition et un parti de la société civile, s'est accompagné d'une série de violations des droits humains et d'une répression politique accumulée.
Principales préoccupations exprimées par les membres du Congrès
Les lettres, signées notamment par Karen Bass, Chris Smith, Sara Jacobs et Michael McCaul, mettent en lumière plusieurs points critiques :
ONU. Dérive autoritaire et répression politique
• Arrestation de personnalités de l'opposition et de la société civile, dont Anicet Ekane, Florence Tchiéto, Djeukam Tchameni, Fabrice Guérin et le professeur Jean Calvin Abala Oyono.
• Suppression des médias indépendants et restrictions des mouvements politiques.
• Disparitions forcées et détentions arbitraires, qualifiées de crimes au regard du droit international.
b. Violences post-électorales
• Quatre personnes tuées à Douala lors de manifestations.
• Arrestation de dizaines de civils, y compris des mineurs, sans lien direct avec les protestations.
c. Crise sécuritaire et instabilité régionale
• Activités persistantes de Boko Haram et ISWAP dans l'extrême-nord.
• Conflit armé dans les régions anglophones avec les groupes séparatistes ADF et SOCADEF.
• Plus de 700 000 déplacés internes , selon le HCR, et des milliers de réfugiés au Nigeria .
3. Recommandations formulées au Département d'État
Les membres du Congrès appellent à une réorientation de la politique étrangère américaine vis-à-vis du Cameroun, s'articulent autour des axes suivants :
• Libération immédiate de tous les prisonniers politiques et défenseurs des libertés fondamentales.
• Poursuites judiciaires contre les auteurs de violations des droits humains.
• Dialogue inclusif entre le gouvernement camerounais et la société civile, en vue d'une résolution pacifique.
• Respect des principes démocratiques, notamment la transparence électorale, la liberté d'expression et l'indépendance de la justice.
Implications diplomatiques et bilatérales
Les lettres rappellent que le partenariat entre les États-Unis et le Cameroun, historiquement centré sur la lutte contre le terrorisme, la sécurité maritime et l'aide humanitaire, a été fragilisé par la suspension de l'éligibilité du Cameroun à l'African Growth and Opportunity Act (AGOA) en janvier 2020. Cette suspension, motivée par des reculs démocratiques, illustre la volonté américaine de conditionner sa coopération à des engagements clairs en matière de gouvernance et de droits humains.
Une visite parlementaire américaine est prévue à Yaoundé du 18 au 22 novembre 2025, avec pour objectif d'évaluer la situation sur le terrain et de renforcer les canaux diplomatiques en faveur d'une sortie de crise.
Les lettres envoyées à Marco Rubio traduisent une inflexion stratégique dans la posture américaine vis-à-vis du Cameroun. Elles témoignent d'une volonté de conjuguer pression diplomatique, conditionnalité de l'aide et soutien aux forces démocratiques locales. Dans un contexte de verrouillage politique et de fragmentation sécuritaire, ce positionnement pourrait contribuer à ouvrir des perspectives de dialogue, à condition que les autorités camerounaises acceptent de rompre avec la logique répressive et d'engager une transition inclusive.
Gontran ELOUNDOU
Analyste politique
+237 673 933 132
- Vues : 188
