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Cameroun : succession à la tête de l'Etat, l’après "Biya" incertain ?


En Afrique subsaharienne, la question de la succession présidentielle a toujours été une véritable énigme. Ailleurs, le problème est réglé par la loi à travers la constitution qui limite les mandats et suscite de réelles vocations et ambitions présidentielles. Les analyses politiques et les prospectives des phénomènes politiques en Afrique, sont confrontées à la question de : « qui pour succéder à… ? » Tchad, Cameroun, Centrafrique, Congo, Gabon et Guinée-Équatoriale sont les territoires ou les incertitudes autour de la succession à la tête de l’Etat sont les plus accrus.


Le Cameroun présente un réel flou politique lié à la succession à la tête de l’Etat.
Avec 41 ans en tant que chef de l’Etat, le Président Paul Biya ne semble pas prêt à désigner à sa suite un successeur. Cette situation fait du Cameroun, un pays dont l’avenir politique est de plus en plus lié aux incertitudes. Ce pays d’Afrique centrale, fait face à une véritable crise de la succession. Les observations de la scène politique au Cameroun, ne laissent pas entrevoir une succession imminente. Paul Biya, fidèle à ses habitudes, dont son énigmatique silence, ne fait que place aux devinettes aucun favori parmi les différents acteurs politiques au sein de la majorité. De plus en plus, le nom du fils du président de la République fait l’objet de supputations des plus récurrentes. Mais ces messages subliminaux, envoyés par le parti au pouvoir, à propos d’une succession de père à fils, ne semblent pas encore trouver écho auprès des Camerounais dont le désintérêt est de plus en plus manifesté, au sujet des enjeux de la politique.
L’opposition, quant à elle, semble en déphasage avec les attentes du peuple qui espère toujours voir émerger une candidature consensuelle, voir une candidature messianique. Mais les divergences autour du candidat idéal sont de plus en plus fortes. À ces divergences, désormais, s’ajoutent les crises multiples que l’on peut observer çà et là sur le territoire. Bien que plusieurs acteurs politiques présentent un profil avantageux pour succéder au président Paul Biya, l’on ne constate par contre qu’aucun n’ose réellement relever le défi, en assumant une réelle volonté de prendre le fauteuil présidentiel. Aussi, il n’existe pas un réel consensus politique au Cameroun à propos de la succession à la tête de l’Etat camerounais.
Etat des lieux de la succession Cameroun : le climat sociopolitique, entre conflit et incertitude politique autour de la succession de Paul Biya.
Le climat socio-politique au Cameroun, présente des spécificités et situations ayant une évolution marqué années après années. Il y a une dix an, le Cameroun présentait un climat social moins tumultueux. Il était essentiellement question à cette époque de savoir quels sont les acteurs politiques capables de faire sortir les Camerounais de l’état de pauvreté dans lequel ils se trouvent. Aujourd’hui, à la situation de pauvreté, s’ajoute un contexte de crises multiformes. Le contexte de la succession est des plus importants dans la mesure où les crises qui émaillent le Cameroun ont pour fond des revendications parfois politique, mais aussi des troubles d’ordres religieux. Si Boko Haram vise à établir un Etat islamique dans les zones prétendument musulmanes, la crise du Nord-ouest et du Sud-Ouest (NoSo) quant à elle, a pour ambition la création d’un Etat anglophone. À côté de cela, viennent s’ajouter les alertes incessantes provenant du flanc Est, qui signale la monté en force d’un front armé venant de la République centrafricaine.
L’environnement « crisogène » établi au Cameroun est le reflet de l’atmosphère politique. On constate un morcellement territorial où les individus, ont des revendications motivées essentiellement par le repli identitaire, une conséquence de la pauvreté générale. Les partis politiques depuis le retour de la démocratie il y a une trentaine d’années sont le reflet de la (ré) partition tribale. Les acteurs et leaders politiques ne parviennent pas à se détacher de leur tribu. Être leader de parti politique au Cameroun n’est rien d’autre qu’être représentant d’un groupe tribal sur la scène politique. La question du tribalisme est donc bien présente dans le jeu politique. Ce phénomène politique est un véritable handicap pour les acteurs politiques qui, se heurtent à la surdité du peuple qui leur fait d’office un procès d’intention tribalisme. Les divisions observées donc au sein de la classe politique au Cameroun ne permettent donc pas d’assurer qui pourra succéder au Président Paul Biya.
Au Cameroun, la construction de l’imaginaire politique est fondée sur les suspicions tendancieuses liées aux mouvements tribaux. Le RDPC, parti majoritaire, a été catalogué par l’estampille de parti « bulu ». Le MRC qui, en 10 ans d’existence aura suscité tant d’espoir auprès des populations, ne parvient pas à se positionner au delà d'une impression tribale. Aujourd’hui, il suscite plus de crainte. L’usage de référent identitaire ou tribal sur la scène politique crée automatiquement des clivages. Avec plus de 250 groupes ethniques au Cameroun, se positionner comme un parti politique national n'est pas évident. Maurice Kamto a laissé prospérer l’idée d’une politique fasciste, dont le but est de créer une haine vis-à-vis des « bulu » et affidées. Le PCRN parti du jeune et énergique Cabral Libii a aussi montré quelques limites durant les élections législatives et municipales. Son électorat. Un électorat devenu essentiellement communautaire, au vu de ses résultats au sortir du scrutin législatif. Le PCRN  n’aura pas pu glaner de siège en dehors de zone ayant un ancrage territorial proche des origines de son leader. avec des victoires principalement dans le Nyong et kelle dans la Sanaga Maritime et dans le Wouri-Est. La solution pour 2025 reste encore hypothétique, le jeu est ouvert.

Gontran ELOUNDOU

Analyste Politique

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politique, succession

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